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18 janvier 2009

Aidez vos proches à surmonter la dépression (par Jérôme Palazzolo)

A voir sa tête, en quatrième de couverture, Jérôme Palazzolo a pourtant l'air sympathique... Comme quoi les apparences sont trompeuses (ce qui n'est pas nouveau, mais toujours vrai, voire de plus en plus vrai).

Vous voulez sortir de dépression ?
Ne lisez pas ce livre.

Vous voulez aider vos proches à surmonter la dépression ?
Ne lisez surtout pas ce livre.

Sa couverture, déjà, en dit long : au premier plan, en couleurs vives (rose et orange) des cachets et des gélules, dont l'une est déjà sortie de son emballage métallique, prête à être avalée.
En arrière-plan, un homme qui tente de réconforter une femme - et ça n'a pas l'air de marcher... heureusement qu'il y a les cachets !

La tête des personnages est deux fois plus petite que le flacon de gélules. Ce qui s'explique par la perspective. Seulement par elle ?

En tout cas, les cachets sont peints avec plus de détails que les personnages, tellement schématiques qu'ils n'ont même pas droit à des visages.

[J'ouvre une parenthèse ; si vous regardez les couvertures des livres de psychiatrie sur amazon.fr, vous découvrirez que leurs couvertures sont souvent significatives : crânes simplifiés, représentations de visage si abstraits qu'ils sont privés de toute humanité. Jamais de photo de personnes réelles - ce n'est pas de ça dont on parle.]

Mais dépassons la couverture pour entrer dans le vif du sujet.

p.16 : l'auteur nous présente Lucienne. âgée de 82 ans, elle a perdu son mari, avec lequel elle vivait depuis 63 ans. Il est décédé il y a un mois. Lucienne n'a plus le goût de vivre.

Bon, jusque là, je ne sais pas vous, mais moi ça ne m'inspire rien d'autre que : "C'est la vie... c'est triste." - ou : "C'est la mort... c'est triste."

Mais l'auteur est un psychiatre, donc il ne se contente pas de ce genre de banalité. Voilà ce qu'il dit :

"Pour ce qui concerne cette dame, le diagnostic porté est celui de deuil, réaction tout à fait adaptée au vu des circonstances."

Ce qui est intéressant, dans cette phrase, c'est la contradiction entre ce qui est dit explicitement, et ce qui est dit implicitement - entre l'idée énoncée, et le choix des mots.

D'une part, la pauvre dame est normalement déprimée, vue les circonstances - d'autre part, elle souffre d'une maladie (puisqu'on ne pose de diagnostic que sur les maladies) qui a un nom bien précis, un nom en italique : deuil.

Or une maladie n'est pas une réaction normale, et une réaction normale n'est pas une maladie.

Détail, dites-vous ?
Pas du tout.
C'est avec ce genre de phrase que se profile un avenir où l'on n'aura plus le droit d'être triste de la perte d'un être cher - enfin, si, on aura le droit, mais ce sera pathologique.

P.46 : l'auteur décrit la réaction du patient auquel on révèle qu'il est "dépressif" :
- colère, agressivité ;
- découragement face à l'inévitable.

Si le diagnostic a cet effet-là, on pourrait peut-être s'en passer, non ?

p.60 : "Les personnes dépressives souffrent d'une incapacité à vouloir, sorte "d'endormissement de la volonté". Il est donc inutile de faire appel à leur volonté".

Cette phrase-là est l'équivalent d'une bonne dose de cyanure : je vous conseille de ne pas l'avaler (c'est-à-dire de ne pas y croire).

Les personnes dépressives ne souffrent pas d'une incapacité à vouloir. Les personnes dépressives ont oublié qu'elles ont le choix. Elles ne se rendent pas compte - précisément parce que tous les psychiatres serine le contraire - qu'elles peuvent choisir leurs émotions en choisissant leurs pensées.

Nous ne sommes pas les marionnettes de nos émotions ; ou si nous le sommes, c'est seulement parce que nous avons oublié que nous pouvons nous élever au-dessus d'elles. Notre esprit n'a pas à suivre comme une girouette les mauvaises pensées qu'un mauvais vent lui impose. Nous ne sommes pas obligé de croire tout ce qui nous passe par la tête.

Nous ne sommes pas obligés de nous soumettre à nos états d'âme.

On peut se lever le matin et entamer la journée du bon pied, même si on n'est pas dans l'humeur, simplement parce qu'on l'a décidé. Dépressif ou pas dépressif, l'être humain est un être humain : une créature qui a le choix.

p.61, l'auteur affirme que les antidépresseurs ne produisent ni accoutumance, ni dépendance.

C'est pas beau de mentir.

p.72, à propos de quelqu'un qui pense au suicide, l'auteur conseille : "ne le culpabilisez pas, évitez les phrases du type "pense à tes enfants".

J'ai rarement lu au conseil aussi contre-productif... enfin, contre-productif si le but est d'empêcher le suicide. Tant qu'à faire, pourquoi ne pas déculpabiliser le geste ?
Comme ça, il sautera plus facilement du haut du pont...

Mais passons.

Le livre entier insiste sur :
- la prétendue irresponsabilité du dépressif ;
- la nécessité pour l'entourage de l'encourager à bien prendre ses cachets ;
- le discours victimisant que l'entourage doit tenir à celui qui va mal : p.95 "vous devez lui faire comprendre qu'elle n'est pas responsable de son état".

Ah bon ?
Pas responsable de son état ?
Alors qui ?

La vérité, c'est que nous sommes responsables de nos vies. Et la dépression ne constitue pas une exception à la règle : nous sommes toujours, en toutes circonstances, responsables de nos vies.

Pas de ce qui nous arrive... (comme par exemple, une tuile tombant d'un toit sur notre tête) - mais de ce que nous en faisons.

La dépression est un état d'âme - notre état d'âme. C'est à nous de l'accueillir comme une reine ou de la traiter comme une intruse. Si nous l'honorons, elle s'installera chez nous pour longtemps. Si nous ne lui prêtons aucune attention, elle se sentira mal accueillie et partira ailleurs.

Encore une contradiction : juste après avoir "rassuré" le dépressif en lui expliquant qu'il n'est pas responsable de son état, le proche est sensé le rassurer encore, mais cette fois-ci sur "ses capacités personnelles". (p.96)

Comme c'est logique...
"T'es qu'une victime, tu n'y es pour rien, mais t'en fais pas, tu es tout à fait capable de t'en sortir, t'as les capacités pour ça."
Cherchez l'erreur.
Si on n'a rien fait pour se mettre dans la mouise, mais vraiment rien, comment pourrait-on avoir les capacités pour s'en sortir ?
Entre le statut de victime ("pas responsable de son état") et les capacités personnelles, il faut choisir.

Un conseil : choisissez les capacités personnelles. Le statut de victime n'apporte que des justifications de ce statut - autrement dit, de gros ennuis.

p.101 : l'auteur déconseille vivement l'alcool et le cannabis.

Ce serait logique, s'il ne conseillait pas encore plus vivement d'autres drogues - celles qu'il prescrit.

Dans le genre comique, p. 131, un témoignage : "Un docteur me l'a confirmé : lors d'une dépression, on ne peut pas se donner de coups de pied au derrière."

Pas besoin d'avoir fait des études d'anatomie pour en convenir...

Bref : un livre qui n'est qu'une apologie de plus de ces merveilleux médicaments qui protègent du suicide (sauf que c'est l'inverse) et une victimisation de plus de ces pôv' dépressifs impotents même pas capables se brosser les dents (sauf qu'il suffirait qu'ils lisent Le succès selon Jack pour que ça leur passe...)

Ne lisez pas Aidez vos proches à surmonter la dépression. Lisez Le succès selon Jack, Psychocybernétique, Le succès par la pensée constructive, et tous les autres livres conseillés à droite. Je vous garantis, je vous promets, qu'ils feront une énorme différence pour le mieux dans votre vie.

3 commentaires:

  1. Salut Lucia,
    Post très vrai encore une fois...
    Comment j'ai pu me laisser avoir par des phrases de ce type "la dépression n'est pas une question de volonté..." et patati et patata..., lorsque je vois le temps que j'ai perdu avec des affirmations comme celles là... et le mal qu'elles m'ont fait.
    Vivement que le Succès selon Jack soit entre mes mains...
    Par ailleurs, que pensez-vous de cette citation chère Lucia (Le jour où tout a basculé de Sylvain Augier): "A un rond-point de la vie, soit tu choisis de tourner en rond, soit tu choisis la voie qui te fait le plus peur", je la trouve vraiment superbe.
    J'en ai justement tellement marre d'avoir peur, j'aimerai tellement retrouver cette insouciance qui m'a rendu heureux pendant des années mais que j'ai l'impression d'avoir perdu à jamais...
    A bientôt.

    Julien

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  2. Salut Lucia,
    Je ne suis pas d'accord avec toi : cet ouvrage m'a au contraire bien aidé. J. Palazzolo n'y fait pas l'apologie des médicaments, bien au contraire : il donne l'info pour qu'on sache ce qu'on prend !
    Et pour info, les médicaments qui rendent dépendants ce sont les tranquillisants (benzodiazépines), pas les antidépresseurs. Je peux d'autant mieux en parler que je suis sous traitement, et que je suis en train de l'arrêter sans aucun problème.
    Moi, ce livre m'a bien aidé tout au long de ce douloureux parcours dépressif...
    Biz,
    Jean-Pierre

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