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08 décembre 2008

Joujoux

Les gens courent après ce qui correspond à leur définition personnelle du bonheur.
Pour certains, ce sera une belle maison ; pour d’autres, beaucoup d’argent ; pour d’autres, la gloire ou du moins, une solide réputation dans leur quartier ; pour d’autres, la fête avec des amis ; pour d’autres, des vacances en Martinique ; pour d’autres, changer de métier…
Si, par chance ou malchance, ils parviennent à attraper le lièvre qui les fait courir, la forme adorable de leur rêve se dissout tout de suite entre leurs doigts comme un peu d’écume… Déçus, ils s’aperçoivent que ce n’était pas ce qu’ils imaginaient ; ce n’est pas ce bonheur qu’ils s’en promettaient. Aussitôt, ils repartent en chasse après une nouvelle proie. Leur déception ne les a pas rendu plus sages ; ils s’imaginent toujours que le bonheur est dans un joujou…
Les Hommes s’essoufflent derrière des illusions, des chimères.
Mais si la plupart d’entre eux cherchent le bonheur dans une circonstance, un événement, un objet ou une réalisation concrète, c’est qu’ils jouissent - en toute inconscience - d’une certaine tranquillité d’âme qui leur donne la liberté d’imaginer le bonheur caché dans tel ou tel lieu. Or lorsqu’on souffre profondément, on perd et cette jouissance, et cette inconscience.
Lorsqu’on dérive dans l’angoisse, le désespoir et la perte, lorsque le chaos règne dans la tête et le cœur, toutes les définitions capricieuses et personnelles qu’on a pu se faire du bonheur commencent à s’écailler. Erodées par la souffrance, elles s’effacent petit à petit.
Un nouvel MP3, des chaussures de marque, un voyage autour du monde, un premier rôle dans un film… Il est de moins en moins facile de se laisser leurrer par les promesses de la société de consommation, ou par ses propres caprices.
Lorsqu’on souffre de dépression, on a l’opportunité de découvrir que la plupart des buts que la société nous propose ne sont pas valables.
Un dépressif n’a pas besoin de devenir très riche, très célèbre ou très puissant pour vous apercevoir que l’essentiel n’est pas là. Un dépressif n’a pas besoin de s’épuiser à poursuivre des appâts scintillants pour comprendre que le jeu n’en vaut pas la chandelle. Il peut sauter directement à la fin du chapitre Déception. Il peut se dire dès maintenant : « Tout ça pour ça ! » avec un sourire amer. Inutile d’y passer dix, vingt ou trente ans.
La richesse, la gloire, les exploits sportifs, etc., ne sont que des moyens. Mais des moyens de quoi ?
Pas de trouver le bonheur, non. Seulement de l’étoffer ou de le pimenter un peu. Le bonheur n’est pas le pompon du manège ; ce n’est pas une chose qui virevolte au dessus de notre nez, et que nous pourrons attraper si nous sommes assez leste ; ce n’est pas une chose.
L’essentiel ne se voit pas, ne se touche pas, ne se sent pas avec le nez. L’essentiel est immatériel.
En nous permettant d’évaluer à leur juste et piètre valeur les hochets que l’Humanité surévalue, la dépression nous aide à gagner du temps, beaucoup de temps, parfois toute une vie. Nous pouvons lui dire merci.

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