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09 décembre 2007

Réviser son identité, ses projets


Conseils en "nous"

L'identité ouvre la route des projets ; les projets bornent l'identité. Ainsi, être un intellectuel, c'est se lancer dans des projets d'intellectuels ; être un artiste, c'est nourrir des projets d'artiste… et cetera.

Lorsque notre identité s'amollit et s'enroule en volutes incertaines, nos ambitions le font aussi, points d'interrogation qui flottent un peu au dessus du sol. Réciproquement, lorsque nos objectifs sont flous, l'image dans le miroir le devient : dans cet embrouillamini de lignes, laquelle cerne notre visage ?

Alors examinons nos objectifs : sont-ils des projets désirables et réalisables, ou de simples rêves ?

Ombres charmantes et narquoises qui nous narguent en riant, de derrière les boucles blondes qui dissimulent leurs visages de ténèbres, ils nous lancent : " Rattrape-moi si tu peux… " Mais nous ne pourrons pas, et nous ne découvrirons pas qu'ils ne sont rien qu'un peu de vent, qu'un peu de sang, même si nous courons très vite, et c'est précisément ça, le projet… (Pas le nôtre, mais celui auquel nous participons sans le savoir, pauvres moyens d'une fin qui nous dépasse et que nous ignorons).

Alors examinons notre identité : est-elle construite sur du roc ou sur du sable, sur du sable ou sur des sables mouvants ?... Sommes-nous du genre à croire à qu'il n'y a que " la souffrance qui soit réelle ", à surestimer le sang et les larmes, à sous-estimer l'eau et le lait, la citronnade ?... Sommes-nous du genre à nous déchirer à des émotions insoutenables et indicibles, à chercher ce qui fait mal ?...

Raisonnement implicite : puisque tout est faux, la seule chose qui soit réelle, c'est cette absence, ce trou, ce manque, la trace en creux que la vérité a laissé en partant, dans le sable, cette dépression que l'eau salée remplit à chaque marée : baïne de larmes. Mais ce n'est pas comme cela qu'il faut raisonner, ou alors c'est en enfer qu'on finira, entre une bouteille de sexe et un hôpital, entre l'absence d'être et l'absence d'avoir, entre le suicide et le suicide, entre la douleur et le vide.

Conseils en "tu"

Puisque tout est faux, c'est que la vérité est ailleurs ; cherche-la ici, cherche-la là-bas, cherche-la encore.

La mélancolie n'a jamais sauvé personne ; c'est le courage qui en est capable. Les murs invisibles sont à briser, alors ne reste pas dans cette cage d'escalier à demander de l'aide en serbo-croate à des espagnols, à supplier avec insistance : " Aidez-moi, mais ne m'aidez pas… ", à te tatouer des S.O.S cryptés au milieu du dos, à réclamer ce que tu refuses. Cette main qu'on te tend, ne crache pas dessus en pleurant ; n'insulte pas ceux qui essayent : ton désespoir n'est pas une autorisation ; ta souffrance ne te permet pas.

Identique à son cœur, le dragon anesthésié flotte encore entre deux eaux, mais qu'importe ?...

La souffrance n'est réelle que parce qu'elle est langage ; traduis-la en français et ses cris, ses sanglots te diront simplement ce qu'ils ont à te dire : " Je suis perdu… Je ne sais pas ce que je dois faire, je ne sais pas ce qui est bien, je ne sais pas ce qui est mal, je me sens mort à l'intérieur… "

Ne t'imagine surtout pas que c'est ta mauvaise direction qui te rend intéressant(e), ou que ton attirail gothique, ton cortège de démons te donnent un cachet particulier, car rien n'est plus faux. Le nihilisme ricanant qui te charme n'a aucun charme, vraiment - et ce futur en mur de briques que tu contemples avec un secret désir ne te réserve rien de plus que des briques.

Ne laisse pas le piano émotionnel te dicter sa polka, car c'est vers le gouffre qu'il t'entraîne à danser.

La vérité est simple, presque banale quoiqu'étonnante ; tu l'as déjà repoussée d'un haussement d'épaule : " Je sais, je sais… ", mais non, tu ne sais pas : si tu savais tu n'en serais pas là. Écoute enfin l'autre voix, car il n'y a d'issue que pour ceux qui écoutent, ceux qui comprennent et apprennent, ceux qui raisonnent et deviennent.