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13 juin 2007

Ma bouée de sauvetage

Je me suis accrochée à certains livres comme un naufragé s'accroche à une planche. Et cette planche (transformée en feuilles de papier et finalement en livres...) m'a sauvée.

Non, ce n'est pas vrai : il y a autre chose, ou plutôt quelqu'un d'autre, qui m'a sauvé.

Mais les livres - pas n'importe quel livre : certains livres bien précis, que je relisais sans cesse - m'ont aidé. M'ont soutenu. M'ont permis de résister. Ils étaient ma bouée de sauvetage.


11 juin 2007

La Logique Oubliée

Pour savoir ce qu’est la logique, il est nécessaire de faire un petit voyage dans le temps.

Revenons à l’époque où le mot « logique » n’était pas inévitablement associé à « jeu », revenons à l’époque où on l’aimait encore suffisamment pour que le mot qui la désigne vibre de riche échos, fasse « tilt ! » dans les têtes. Revenons aux années trente, quarante ou cinquante…

A cette époque pas si lointaine quoiqu’elle en ait l’air, on considérait que la logique, c’est la raison. On considérait aussi que la logique, c’est l’équilibre psychologique et éthique : être logique c’est être juste, droit, honnête. La logique permet de penser, parler et agir selon les lois de la Sagesse – à laquelle nous accordons une majuscule parce qu’elle la mérite.

La logique, c’est la raison : c’est ainsi qu’on voyait les choses il y a soixante ans de cela.

Et quoique depuis, la logique d’autrefois ait disparu dans les oubliettes de livres poussiéreux pour renaître sous une forme méconnaissable et très allégée dans des tests et des jeux, que les voitures aient changé mille fois de formes et de couleurs, que les immeubles aient poussé comme des champignons, qu’on ait connu un choc pétrolier et le mazout sur les plages, que la lisière des jupes aient remonté au dessus des genoux et que les pantalons descendent toujours plus bas vers les fesses, qu’Internet ait fait son apparition, quelque chose n’a absolument pas changé : aujourd’hui comme hier ou avant-hier, la logique, ça continue à être la raison, la Sagesse.

En effet la logique n’a pas d’âge ; elle ne connaît pas la mode. Ce qui était logique hier continue à l’être aujourd’hui. La véritable définition de la logique reste donc stable. Elle ne peut changer avec la direction du vent ou le nouveau gouvernement : elle est immuable. Plus immuable encore que les châteaux Cathares, qui défient de leurs vieilles pierres obstinées des flots bariolés de touristes éphémères.

Certains savants fous ont bien tenté de mettre à la mode « la logique floue », concept aussi paradoxal que « la sphère cubique » et « le mammifère ovipare », mais sans grand succès.

D’ailleurs, quand bien même leur concept bizarroïde rencontrerait les acclamations de la foule en délire, la logique n’en changerait pas de nature pour autant. Est logique ce qui est clair, rigoureusement prouvé, irréfutable – le flou est parfois artistique, jamais logique.

Ce sont les personnes calmes et réfléchies qui pratiquent et apprécient le plus la logique. Mais si vous n’appartenez pas encore à cette catégorie des « personnes calmes et réfléchies », rien ne vous empêche d’y entrer : il suffit de cultiver la logique dans votre jardin intérieur… Votre jardin est déjà ensemencé de graines de logique. La logique est une faculté innée, que chacun porte en lui à la naissance. Ensuite, la logique se développe et pousse plus ou moins bien, selon la nature du sol, selon la manière dont on s’en occupe, et enfin selon les autres plantes que l’on cultive dans son jardin. Choisissez de soigner votre logique, de l’arroser, de la bichonner, d’arracher toutes les plantes parasites qui pompent sa sève ou lui font de l’ombre, et vous verrez qu’elle se développera avec une vigueur que vous n’auriez pas pu imaginé avant.

La modération, art du juste milieu, permet de raisonner clairement, en toute liberté. Ce précieux équilibre, c’est à la fois la condition et la conséquence d’un esprit logique : pour raisonner logiquement, on a besoin d’une certaine sérénité, mais c’est aussi lorsqu’on raisonne logiquement que l’on acquiert de l’aplomb.

Le monde extérieur influence toujours notre esprit ; un événement inattendu, la tristesse, la joie, la colère, le désir, le stress, un coup de blues… orientent notre sensibilité, se répercutent sur notre manière d’être et d’agir, troublent notre raisonnement.

La joie pousse à l’irréflexion et à l’imprudence ; la peur aveugle, paralyse, conduit aux actes les plus absurdes et contradictoires ; la colère fait prononcer des paroles et accomplir des actes incontrôlés dont on se repend souvent par la suite.

C’est le calme qui refrène tout cela ; il est pour l’être humain ce que sont les rênes et le mors pour le cheval, c’est-à-dire qu’il bride l’impétuosité et dompte l’élan premier. Le calme est une boussole : sans lui, il est impossible de ne pas s’égarer.

La logique est appréciée par les personnes qui ont un bon caractère : ces personnes-là ne se laissent pas entraîner par la passion et vivent en harmonie avec le monde qui les entoure.

La logique est aussi appréciée par les personnes d’expérience, qui ont beaucoup vécu et qui ont tiré profit de leur existence mouvementée. Le temps a détruit leurs illusions, les a rendu tolérantes et sages.

La grande condition pour être logique est d’être calme et équilibré.

Lorsqu’on se laisse happer par l’envie, la haine, les passions brûlantes, on cesse d’être logique : le jugement est un appareil de mesure délicat que les passions dérèglent.

Lorsqu’on se laisse emporter par l’enthousiasme, l’imagination, et l’étourderie, on se prive de la faculté de raisonner. Dans cet état-là, on ne comprend pas ce qu’est la logique, ni l’intérêt qu’elle présente – et pourtant, on en aurait bien besoin, pour éviter tous les pièges où l’on se rue tête baissée à cause de son impulsivité.

Lorsqu’une qualité dépasse la mesure, elle se change en défaut en cessant d’être logique.

Ainsi une trop grande bonté touche à la bêtise. C’est un sacrifice inutile et illogique. Donner aux autres le maximum de secours qu’on peut leur donner sans se nuire est bien, mais se démunir du nécessaire en oubliant que l’existence est une lutte, c’est commettre une espèce d’injustice contre soi-même. Que pense-t-on de ceux qui, à force de dons, se retrouvent à la rue ? Que ce sont des fous. Des fous sympathiques, mais des fous quand même.

Etre franc jusqu’à saboter ses chances de réussite est tout aussi idiot. Peut-être qu’il est injuste de profiter d’une réputation qu’on ne mérite pas, mais ce n’est pas à nous de nous faire du tort par amour de la franchise. La logique demande en toute chose de la mesure et de la sagesse.

Pour parvenir à être logique, il faut se débarrasser de sa légèreté, de sa jalousie, de son égoïsme et de sa tendance au mensonge. Ces « traits de personnalité » (comme on les appelle parfois maintenant) sont en réalité des maladies de l’esprit, des déséquilibres de l’entendement et de l’intelligence.

Pour réussir à être logique, il ne faut pas non plus être d’une naïveté excessive.

La logique demande de la force intérieure, de la clarté intime.

Répétons-le : pour posséder le qualité que l’on nomme « logique », il faut être calme, équilibré(e), raisonnable, et lucide. C’est important de s’en convaincre, car tant qu’on s’imagine qu’on peut être logique sans être calme et équilibré, on avance dans une impasse qu’on prend pour un raccourci : au bout il n’y a qu’un mur.

…C’est ainsi qu’on peut définir la logique au sens commun, la logique telle qu’elle est pratiquée tous les jours par ceux qui font preuve de droiture et de sagesse, et dont on n’entend presque jamais parlé parce que ce ne sont pas eux qui s’agitent sur la scène médiatique.

Au sens philosophique, la logique est définie comme une partie de la philosophie. On dit d’elle que c’est « la science du raisonnement ». ou « l’art de bien penser ». On dit aussi que la logique est « la science de la preuve ». En effet, apporter la preuve de quelque chose, c’est la vérifier, l’éclaircir.

La logique est la recherche de la vérité. Ou plutôt, la logique est le seul moyen valable de chercher la vérité, le seul chemin qui permette de la rejoindre… tous les autres sont des impasses aux faux airs de raccourcis.

La logique est faite de raisonnement.

Mais un raisonnement peut être erroné : si juste que nous paraisse une idée, elle peut être fausse. Une argumentation qui semble claire et impartiale peut être biaisée. Ça arrive même tous les jours. La logique va chercher le point faible de la pensée, le point par où elle s’écarte de la vérité. Elle ausculte le raisonnement comme un docteur ausculte son malade, pour trouver l’endroit où ça cloche.

Pour être logique, l’esprit humain doit être en accord avec lui-même et avec la réalité extérieure. C’est de cet accord que naît la clarté. Dans un raisonnement l’esprit ne doit pas se contredire, ne doit pas se mentir : il doit s’harmoniser avec ce qui est.

Si je passe devant une maison peinte en vert et que j’énonce ceci : « Cette maison est peinte en rouge », je suis en désaccord avec le monde extérieur, avec la vérité perçue, avec ma propre pensée ; je suis illogique.

Lorsque je dis : « tous les hommes sont mortels », je suis logique. Je suis convaincu que tous les hommes sont mortels parce que les faits extérieurs m’ont démontré que mes semblables sont mortels. Tous ceux qui, par le passé, ont trouvé le secret de l’immortalité sont morts aujourd’hui. Et ceux qui, aujourd’hui, prétendent l’avoir trouvé seront morts demain, ou plus tard. Tous les hommes sont mortels : je l’ai observé, je le crois, je le pense, et de plus, cela est véritablement. Je suis en accord avec moi-même, avec la réalité extérieure. Je suis logique, je pense et parle selon les règles de la vérité.

La logique ne consiste pas seulement en ce simple phénomène de coïncidence heureuse, elle est formée de tout le travail de la pensée, de toute la force de l’esprit, de toute la sincérité personnelle, de toute l’intelligence et la clairvoyance nécessaire pour aboutir à cette coïncidence heureuse de l’impression intime avec la réalité extérieure.

(à suivre peut-être)