[En réponse à Maud. Merci, Maud, pour tes commentaires très intéressants.]
Le pardon est un sujet qui excède un peu les limites de ce blog, celles du développement personnel, et même dans une certaine mesure celles de la philosophie.
Le pardon touche en effet de prêt à la spiritualité, à la religion au sens large ; il n'y a pas moyen de l'en séparer complètement.
En même temps, c'est un sujet très important dans le cadre de ce blog (qui est : "comment sortir de la dépression ?").
Car lorsqu'on a beaucoup souffert, et qu'on se refuse à pardonner à ceux qui nous ont fait mal, on éprouve des sentiments d'amertume et de rancœur qui nous ronge... Qui nous ronge, nous, pas eux.
Ces sentiments sont souvent associés à un état d'esprit combattif et militant, guerrier - état d'esprit qui peut avoir des conséquences très positives - mais ils ferment aussi pas mal de portes, et particulièrement celle de la gratitude.
En effet, on aura beaucoup de mal à éprouver une vive reconnaissance vis-à-vis de qui que ce soit tant qu'on est consumé par une forme de haine personnelle (car la haine impersonnelle, celle qui est dirigée contre le mal en tant que principe, n'a elle aucun inconvénient).
Et en disant ça, je ne veux pas dire que la haine personnelle est condamnable, ce n'est réellement pas ce que je pense - car tout dépend de la personne contre laquelle elle est dirigée, et des raisons qui sont à l'origine de cette haine - mais plutôt que la haine personnelle est une limite.
Pour vivre une vie complètement libre, il faut dépasser cette limite.
Et c'est là que le pardon intervient...
Mais en disant cela, je cour-circuite le nœud de la question, je fais comme si le problème à résoudre l'était déjà... Pardonner est un art délicat, un art de funambuliste, et quand on le pratique à l'aveuglette, sans trop savoir comment, ou quand on n'a pas encore les muscles et l'équilibre pour ça, on a toutes les chances de se faire mal.
Voir très mal.
C'est pourquoi ceux qui conseillent de pardonner à tout-va ne font pas preuve de beaucoup de sagesse. Ils se donnent le genre christique, pas davantage. Et ceux qui les écoutent payent les pots cassés.
Si j'ai pu conseiller dans un précédent article de "pardonner", en donnant ce conseil en deux mots, comme si c'était simple, sécuritaire et facile, je suis moi-même tombée dans le travers de ces pseudo-sages...
A ma décharge, je tiens à signaler qu'il y a tout un courant new-age et pseudo-spirituel qui bêle dans d'innombrables livres (que j'ai lus) : "Pardonnez !... Lâchez-prise !... Pardonnez à tous, pardonnez à toutes !... Sautez dans le Grand Tout !... Plongez dans l'Amour Universel !..." Etc.
Difficile de résister au courant.
Difficile de dire : "Ne pardonnez pas... Ou du moins, pas maintenant. Vous n'avez pas encore regardé en face tout le mal qu'on vous a fait. Vous devez explorer davantage vos blessures, vous devez ouvrir plus complètement l'abcès. Vous devez savoir tout ce qu'on vous a pris, vous devez connaître exactement ce qu'on vous a volé."
Mais c'est ce qu'il faut dire...
Et c'est ce que je vous dis maintenant : avant de pardonner, il y a un grand, grand travail à faire.
Si vous savez déjà qui vous devez pardonner, vous ne savez probablement pas exactement quoi lui pardonner. Et même si c'est douloureux, il faut le savoir.
ça ne veut pas dire seulement fouiller dans vos mauvais souvenirs, mais aussi et surtout chercher à identifier plus précisément ce qu'on vous a refusé.
Par exemple le respect...
La tendresse...
La vérité...
L'amour...
La confiance...
La douceur...
La fidélité...
La justice...
Pour comprendre ce qu'on vous a pris, ce qu'on vous a fait, il faut chercher du côté de toutes ces richesses-là.
Un livre comme Parents toxiques n'est instructif que parce qu'il met en regard (de manière implicite) les maltraitances et la bientraitance... Si vous lisez un livre de bons conseils sur l'éducation des enfants, vous en apprendrez aussi beaucoup sur les mauvais côtés de votre propre enfance, même si ce n'est pas le but du livre.
Et de même, si vous voulez savoir de quelle manière exactement votre conjoint vous maltraite, vous avez tout intérêt à lire un bon livre sur les relations de couple, un qui décrive de manière réaliste ce qu'est la confiance, le respect mutuel, l'échange et la tendresse dans un couple.
Autrement dit, pour comprendre ce qu'on vous a fait subir, ce dont vous avez été victime, vous devez chercher du côté du bien tout autant que du côté du mal. Car c'est seulement à la lumière du bien que le mal devient complètement visible, de même que c'est seulement sur un fond immaculé de blancheur qu'on distingue parfaitement une forme noire.
[à suivre]
Je découvre ce blog.......et il me parle vraiment.
RépondreSupprimerBonjour, aujourd'hui j'ai eu à pardonner, pour retrouver une certaine quiétude. Ce matin je passait un examen qui compte beaucoup pour moi, je m'y étais préparé (certainement pas suffisamment) et j'avais depuis plus d'un mois sollicité un ami pour m'aider à faire les démarches d'inscriptions n'étant pas en France, ainsi que mon petit frère pour m'envoyer des papiers, photocopies... L'examen ne s'est pas bien déroulé et j'ai eu un TRES profond sentiment d'injustice car il me paraissait (et il me parait toujours..) avoir réussi correctement les épreuves (en particulier une sur trois passées). Cet échec a eu beaucoup de significations pour moi: depuis des mois de préparation, à en parler avec des amis, à les solliciter, je me sentais d'autant plus "tenu" de réussir en leur nom, et la déception n'en est que plus grande... alors j'essai d'oublier, de leur pardonner comme vous dite (au jury), mais en essayer de voir cet évenement de manière impersonnelle, en me disant que les membres du jury, qu'ils aient décidé de ne pas m'accorder cette épreuve pour des raisons non professionnelles, ou bien parcequ'ils pensaient vraiment que je ne le mérite pas de manière justifiée, sont des humains tout comme moi, sujets aux sentiments et aux émotions, et qu'ils font des erreurs aussi, alors j'essai d'oublier cette matinée en essayant surtout de réprimer tout "jugement" de ma part sur les décisions humaines prises aujourd'hui, j'essai de minimiser les impressions à "j'ai passé l'examen et ça n'a pas marché", une impression robotisée, dénuée de sentiments (tristesse, culpabilité...etc), surtout pas de jugement vis-à-vis du jury (sinon escalade de la violence ?). Pour le moment ça marche, mais est-ce de cette manière que vous pensez que nous devons pardonner ? En se détachant de sentiments/jugements personnels quand aux échecs ? Si c'est bien cela je trouve cela très interressant et pense que cette manière de voir les choses, appliquée à d'autres circonstances pourrait aussi se révéler bien utile.
RépondreSupprimerJe viens de lire l'article sur le pardon et une question me vient à l'esprit. Si le pardon peut être une libération, comment est il possible de le mettre en oeurvre lorsque la personne à qui on doit pardonner, ne regrette abolument pas ce qu'elle a fait. N'y a t'il pas alors une dissociation, entre la raison qui elle pesera le pour et le contre et l'émotionnel qui lui sera tojours par terre à se tordre de douleur. Comment parvenir à un équilibre sans tout refouler au risque un jour de prendre de plein fouet la bête fauve qu'on coyait avoir maitriser. Rien n'est plus délicat que le pardon. bravo pour votre blog continuez !
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