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18 septembre 2006

Ceux qui rient du désespoir des autres : qui sont-ils ?

Au fil des forums, on trouve parfois des messages agrémentés de smileys rigolards, qui répondent à des messages désespérés par : "Je vends des cordes si tu veux. (smiley hilare montrant toutes ses dents). Mais si tu voulais te tuer, ce serait déjà fait. (smiley qui se marre.)

Comme internet est le royaume de l'anonymat, on ne peut que faire des suppositions sur la véritable identité des personnes qui répondent de cette manière à ceux qui souffrent...

Ce genre de commentaire me fait toujours un effet bien particulier : j'aurais envie d'expliquer à celui qui a écrit ça, qu'il ne devrait pas, tout en sachant très bien que tout ce que je pourrais lui dire lui apparaitra comme du moralisme nian-nian, et ne changera absolument rien à sa manière d'être et d'écrire. D'où un désagréable sensation d'impuissance, doublée d'une envie de frapper impossible à satisfaire.

Au XVIIIème siècle, les jeunes nobles anglais à la mode pariaient sur tout et n'importe quoi. Ils organisaient des "courses de vieilles femmes" (pauvres bien sûr) comme si c'était des courses de chevaux, si elles en meurent c'est pas grave. Celui dont la vieille femme est arrivée première, a gagné le pari.

Il y aura toujours des individus - en particulier jeunes, en particulier mâles, mais il y a certainement de nombreuses exceptions - qui ont de l'argent, pas de problème, beaucoup d'arrogance, et qui considèrent le reste de l'humanité comme une source inépuisable de plaisanteries très spirituelles. Pour eux, un homme qui meurt de faim est comique, un clochard est une bonne blague, un désespéré est rigolo.

La compassion, c'est-à-dire la capacité à se mettre à la place des autres et d'imaginer leur souffrance, est atrophiée, ou plutôt inexistante chez eux. Peut-être qu'ils ont une malformation génétique très discrète, moins visible que la trisomie, qui fait qu'à la naissance déjà, ils étaient privés de cette faculté-là... (c'est une hypothèse).

A l'école maternelle, une plaisanterie circulait dans la cours de récré : c'est quoi, un éthiopien avec un chapeau blanc et des chaussures blanches ?... La réponse était : un coton-tige. Mais ce qu'on peut excuser de la part d'enfants de 5 ou 6 ans, cesse d'être excusable passé l'âge de raison. D'ailleurs, il est quasiment certain que celui qui avait inventé cette "blague" n'était pas un enfant.

Si l'on en croit les sites de rencontre et les magazines féminins, beaucoup d'entre nous cherchent un partenaire "ayant le sens de l'humour".

L'humour est une manière de prendre les choses sous leur côté léger qui parfois, aide à dédramatiser sa propre misère, et parfois, aide à dédramatiser la misère des autres : c'est-à-dire, une manière de s'insensibiliser aux souffrances de l'Humanité. Une manière de devenir indifférent, cynique... sadique.

Comme aurait pu le dire un empereur romain : Qu'ils crèvent, pourvu qu'on rigole, pourvu qu'on passe un bon moment... Et c'était bien à cela que servaient les jeux du cirque et ses meurtres : à passer un bon moment, à se divertir.

Les publicités colorées et rigolotes ont un peu le même effet. Sur certains sites pour ados, on trouve des messages de désespoir et de souffrance totale, encadrés par des publicités du genre cartoon. Ce contraste typique de notre époque, a pour effet de banaliser, dédramatiser, relativiser la souffrance des autres - car la sienne, on la connait toujours trop de trop près pour en faire peu de cas.

Prenons par exemple la phrase "j'ai envie de mourir" prononcée par un jour d'hiver froid et pluvieux, sur un pont - et la même phrase dans une bande dessinée de Garfield. Dans ce second contexte, elle fera rire. Dans un comics, rien n'est sérieux.

La publicité et ses images marrantes, colorées, second-degré, crée à tout ce qu'elle entoure (et que n'entoure-t-elle pas dans notre monde ?...) un contexte de comics. Envie de mourir ?... Bonne blague ! Vas-y, t'es pas cap ! Ah, t'es cap ? Pas grave : un de perdu, dix de retrouvé...

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