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10 octobre 2006

Souvenirs, souvenirs

Même ceux d'une période horrible peuvent avoir quelque chose de charmant, à distance. Un certain cachet de vieille photographie, une aura de nostalgie, un parfum de bruyère...

Le passé d'un(e) ex-dépressif/ve, c'est un océan de souffrances vagues et aïgues, informes et précises. Un chaos de douleurs où s'entrechoquent l'infime et l'essentiel, le détail et le principal. Au plus haut point du bonheur, on pressent qu'on est perché au sommet d'une pente glissante - pente que l'on va inéluctablement dévaler... Les hauts et les bas se succèdent, mais au plus haut on souffre encore - de cette altitude anti-naturelle, de cette instabilité fondamentale, de cette incapacité à trouver ses pieds, sa base.

A quoi se raccrocher ? A qui se fier ?... comme la girouette de métal qui tourne aux quatre vents, on oscille d'une direction à l'autre, incapable de décider, incapable de savoir ce que l'on veut vraiment.

Et ce n'est qu'un des aspects du mal-être. La nullité humiliante que l'on se sent être en est un autre : comment demander aux autres de reconnaître notre valeur, quand nous sommes nous-mêmes incapables de la percevoir ?...

Les condamnations définitives se succèdent dans le théâtre intérieur que nos voix intérieures se disputent :
- Je suis nul... Personne ne m'aimera jamais... Je ne vaux rien, je ne suis rien... Je n'existe pas...

Qui nous donnera l'autorisation de vivre ? de respirer ? Qui nous débarrassera de cette angoisse profonde, lancinante, existentielle ?... Il ne suffit pas de relever fièrement la tête en proclamant : "Moi, moi ! Je vais m'en débarrasser tout seul !..."

L'orgueil échoue devant ce mur, et l'échec au goût de cendre se cueille entre ses pierres...

Quand au présent d'un(e) ex-dépressif/ive, c'est un chemin invisible, étroit et rectiligne, invisible pour les yeux mais nettement tracé pour le coeur, que l'on emprunte entre Charybde et Scylla, et où l'on avance en toute sécurité. L'angoisse qui s'accroche encore, comme une plante pariétale, ne demande qu'un peu plus d'allant pour tomber d'elle-même. Confiance et beauté sont des bornes confirmant que la direction est bonne. On se fie à qui l'on doit se fier, on a trouvé de l'aide, on s'y maintient, on devient fort.

4 commentaires:

  1. Bonjour Lucia,
    comment va ?

    Une question comme ça, et si la solution, la grande question sur la vie se trouvait dans la souffrance ?
    Les manuels religieux nous montrent des élus ou prophètes ayant menés une vie de souffrance, pourquoi ?
    Peut-on dire que certains se plaisent dans la souffrance ? et que d'autres cherchent par tout les moyens d'aller mieux ?
    Il est bon d'aider les autres et essayer de sortir ensemble de problèmes, mais si la véritable quête se trouvait dans la souffrance justement, peut-etre que ceux qui souffrent veraient plus de choses que les autres et ça serait alors ça qui leur donneraient l'envie plus souvent d'en finir...

    Problèmatique ambigue :)
    bye

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  2. Salut Eipho!... :-)

    en fait je crois qu'il faut faire la différence entre deux types de souffrances :
    - il y a d'une part les tracas, soucis, fatigues, déceptions... qui sont inhérents à la vie, et que personne ne peut éviter. Ces souffrances-là, il vaut mieux les accepter dès le départ.
    - la souffrance morale liée à une confusion des valeurs, une absence de repères stables, des questions sans réponses, la haine de soi, etc. Ces souffrances-là sont liées à une problématique bien particulière, et l'on peut s'en débarrasser.
    Pour ce qui est des élus et prophètes, certes, ils ont eu des vies difficiles, pleines d'épreuves, mais leur mental était parfaitement clair, ils savaient parfaitement ce qu'ils faisaient sur cette terre, et cette lucidité, même si elle n'est pas le bonheur, est tout de même quelque chose de très précieux.

    Se dire "je vais arriver à être heureux non-stop" est illusoire, mais par contre, se débarrasser de la confusion et de l'angoisse est possible - au prix tout de même de bon nombre de changements... La souffrance peut avoir son utilité dans certains cas - par exemple, certaines humiliations très désagréables peuvent débarrasser de l'orgueil... -, mais elle a ses limites.
    Je pense qu'il n'est bon ni de la chercher, ni de la fuir systématiquement. Par exemple, aller à un enterrement n'est pas agréable, mais éviter un enterrement c'est éviter une prise de conscience par rapport à la réalité de la mort.

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  3. voila, exact, parfaitement repondu.

    Je n'arriverais jamais a te faire douter décidement ;)

    Si j'avais un poste vaquant a combler, pour aider
    des adultes ou ados depressifs dans un centre spécialisé, je pense que c'est toi que j'appelerais.
    A+

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  4. Je trouve ton blog très enrichissant et très bien écrit.
    Je ferai un commentaire plus constructif quand j'aurai tout lu :-)
    Sylvain

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