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07 septembre 2008

LE DEUIL

Lorsque la mort vient frapper un proche - et que c'est la première fois qu'elle frappe si près - il se passe parfois quelque chose qui n'est pas exactement du chagrin, pas seulement du chagrin, et qui est peut-être pire que du chagrin : une prise de conscience.

Il est si facile de croire que la mort n'existe pas. Qu'elle concerne seulement ceux qui se retrouvent malgré eux au journal de 20 heure. Ou les personnages des films d'horreur. Mais nos proches ?... mais nous, peut-être ?

On peut passer des années en esquivant toujours cette pensée, cette certitude : "je mourrai un jour". On peut l'oublier, l'enterrer, l'écarter, la neutraliser, l'anesthésier, la cacher très loin, très profond - et puis un jour, un ami meurt. Un oncle. Un père.

Et ce n'est pas seulement le chagrin qui nous submerge, mais le voile de l'insouciance qui se déchire : mais alors... nous aussi ? Bientôt ? Quand ? Et... après ?

Que se passera-t-il pour nous lorsque nos os seront bien nettoyés, bien propres ? Serons-nous vraiment devenu rien, néant ? Notre conscience n'accepte pas cette éventualité. Il y a un mur d'impossibilité, un mur d'inconcevable, où l'on va se cogner la tête comme une mouche contre une vitre. L'obstacle est invisible mais coriace. Mineur ? Majeur ?

Est-ce important, la mort ?... Et notre vie, devant ce gouffre, quelle est sa valeur ?...

Le décès d'une personne proche nous renvoie à ce doute, à ce point d'interrogation acéré qu'on a tout fait pour oublier, qu'on a su oublié, et dont on ne sait plus que faire. Et qui nous transperce comme une flèche.

L'insouciance, la légèreté... Cette superficialité souriante qui nous tend les bras... pouvons-nous encore nous y réfugier comme dans un giron ? Non ! Elle a perdu son charme, elle n'a rien à répondre à nos questions, elle se contente de rire, de secouer ses boucles blondes, de nous dire : "détends-toi... ne t'inquiète pas... carpe diem, profite !" Elle se contente de nous engager à JOUIR.

Mais ce n'est plus ce que nous voulons, ce n'est plus ce que nous pouvons ; nous ne sommes plus des enfants - même si chez nous l'enfance a duré plus longtemps que prévu. Elle est terminée maintenant, terminée pour de bon ; nous avons BESOIN de savoir.

Besoin de comprendre.

Cette mort, ce deuil, a ouvert une porte que rien ne pourra jamais refermer. La seule manière de s'en détourner serait de mentir - d'avaler quelques prozac - d'enfiler le costume du clown de MacDonald - de devenir un leurre. Et nous ne voulons plus de leurres...

La souffrance s'approche en rampant ; l'angoisse siffle dans l'herbe de nos rêves. Nous le sentons, même si nous ne nous l'avouons pas : ce point de simili-confort est précaire. Nous sommes arrivés au sommet de la montagne russe, la descente va commencer. Il n'y a pas d'espoir dans tous nos espoirs ; pas de projet dans tous nos projets ; pas de vérité dans toute notre réalité.

Il y a ce trou noir derrière la porte banale, ce néant sans étoile. Il nous aspire.

Il y a cette nuit inquiétante mais réelle qui nous appelle.

Il y a la dépression qui commence.

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